Partis pour réaliser un article sur les "casseurs de pub"

Association des « Casseurs de Pub ».

Qui sont et que font les « casseurs de pub » ?
C'est pour répondre à cette question que je me suis lancé dans une recherche sur cette association, dont nous connaissons tous l’existence, et a priori tous également la démarche.
Je n’étais pas au bout de mes surprises.
En réalité, l’association des « casseurs de pub » n’a de « casseur » que le nom. La première phrase de leur profession de foi, disponible sur le net (i), donne immédiatement le ton : « Sommes-nous des « casseurs », des gens « pas bien dans leur tête », comme s’emploient à le faire croire les publicitaires ? Non, bien sûr. Au contraire. ». Premier sursaut. Si la publicité est bien saisie comme « une machine à casser » la nature, l’humain, la démocratie, la culture, l’économie (?) ou encore l’éducation.... bien loin de vouloir casser cette machine, les antipub propose pour « l’enrayer » de rentrer dans combat argumentatif. Immédiatement, toute opposition claire et radicale est évincée : « Nous menons un combat non-violent fondé sur l’argumentation » précise le texte fondateur. Cela nous promet bien du plaisir. Car non seulement le choix de l’arme, le discours, est ici bien plus que douteux, mais l’argumentation qui y est déployée s’adonne aux enfantillages et vire rapidement au ridicule. En effet, « si nous ne voulons pas détruire le monde », il s’agira de défendre les valeurs « immatérielles » de l’Homme, comme l’amitié ou l’égalité, ou encore « le Verbe et le symbolique », contre celles des publicitaires, individus « souriants et bronzés », qui ne pensent qu’au fric. Le duel on le voit est engagé.
La non violence du combat atteint vite ses limites, et démontre une nouvelle fois l’inopérance du discours devant une agression qui, elle, est bien concrète. Le parler-au-lieu-de-faire, outre donc une absence notable d’efficience, permet évidemment aux publicitaires et à leurs défenseurs en tout genre de jouer le jeu bien maîtrisé de la dispute argumentative (ii). Ces derniers, accumulant les contre arguments appropriés, ne font qu’investir logiquement un espace ouvert par les casseurs eux-mêmes, voilant le véritable espace de confrontation. Le nec plus ultra de cette tendance à l’argumentation étant peut-être la publication sous la forme d’une bd humoristique des principes anti-pub. Cet objet, qui vise par sa nature même une clientèle ciblée, est disponible à la vente pour 4 euros et vous présentera dans les dernières pages les inévitables bons de commande et possibilités d’abonnements.
L’invitation à la transformation esthétique des panneaux publicitaires ne vaut guère mieux, et dévoile la même « tiédeur » d’intentions. Outre le fait qu’une telle démarche consacre évidemment la pub, au moins comme support, elle offre à la machine publicitaire une formidable possibilité de récupération et d’intégration. Un simple exemple (iii) : en 2004, la RATP annonce qu’elle va offrir, pendant une semaine 47 panneaux publicitaires à la « libre expression » des artistes en tout genre. Il ne s’agit donc rien de moins que de proposer des panneaux de pub pour les antipubs.
Le refus de la violence chez les « casseurs de pub », violence qui n’a pourtant lieu que contre des objets et ce qu’ils représentent, peut sans doute s’expliquer par la nature associative du mouvement. En s’institutionnalisant, ce mouvement délaisse la dimension directe et autonome de son action, et chute dans une inertie contrainte et autodestructrice. Et si la formalisation associative se veut favoriser simplement les liaisons entre ses membres ou permettre un relais efficace de ces actions, il me reste alors par exemple à signaler que je n’ai obtenu aucune réponse à l’ensemble des demandes de rencontres que j’ai proposé, avec des membres de l’association, pour l’écriture de cet article.

i. Pourquoi nous appelons-nous « Casseurs de pub » ? http://www.casseursdepub.org/index.php?menu=pourquoi
ii. Voir par exemple l’article de Florence Guernalec. « Le mouvement antipub, des ex-publicitaires au secours de l'humanité ». www.crackersandco.com/200412/041217lesantipubs.htm
iii. Donné dans « L’« antipub », un marché porteur » de François Brune. Mode Diplomatique. Mai 2004.


Donatien.